La petite Histoire

L’arrivée du chemin de fer à L’Arbresle

Résumé

Parmi les événements qui ont fortement marqué la vie Arbresloise, l’arrivée du chemin de fer est de ceux qui ont eu une importance capitale, comme l’industrie textile, les grandes inondations ou la proximité de l’Abbaye de Savigny. Il est donc intéressant de rappeler dans quelles circonstances cette révolution dans le transport a touché notre région.

Avant le chemin de fer

 On a de la peine à imaginer aujourd’hui les énormes bouleversements provoqués par l’arrivée du chemin de fer tant au plan économique que dans la vie des gens. À l’Arbresle c’est vers 1868 que les choses commencèrent à se concrétiser sérieusement mais ne grillons pas les signaux !

Il faut se remettre en mémoire la vie en France au début du XIXème siècle. La Restauration avait suivi l’époque napoléonienne. Ce fut une période de grande prospérité économique pour l’Arbresle avec l’arrivée du tissage vers 1815.

Les Ponts et Chaussée, créés en 1804, durent faire un effort important pour faciliter les transports, accrus par le développement des activités. Sur la période 1815-1824, ce sont 17.000 kms de routes nationales qui furent ouverts et 5000 kms de routes départementales (à l’Arbresle, c’est en 1820, selon Picard qu’à été ouverte la route l’Arbresle-Lozanne).

Les canaux connurent aussi leur période de gloire : c’est en 1826 que fut ouvert le canal du Rhône au Rhin.

En 1835, le réseau routier totalisait 35.000 kms de routes royales (nous étions sous le règne de Louis-Philippe). On était déjà loin des « chemins malaisés et sablonneux » de la marquise de Sévigné !

Tout cela ne fit que développer les métiers concernés par les transports ; on ne comptait pas moins de 2000 entreprises de messagerie. La malle-poste qui assurait le transport du courrier faisait Paris-Lyon en 33 heures.

Les chemins de fer naissants ont donc eu affaire dès le début à cette concurrence bien établie, mais l’esprit d’entreprise, la volonté étaient là, aussi. Les débuts furent lents : au 31 décembre 1839, seulement 224 kms de lignes étaient ouvertes.

Dans notre région, la première ligne : Saint Etienne-Andrézieu est ouverte en 1827 et Saint-Etienne-Lyon en 1830. Le choix de ces tracés n’était pas dû au hasard ; le chemin de fer semblait répondre à un problème mal résolu par les transporteurs de l’époque : l’acheminement du charbon.

C’est à partir de 1851 que le développement du chemin de fer s’accentua rapidement sous la forte impulsion de Napoléon III. L’organisation générale du réseau était déjà bien en place et les grandes lignes fonctionnaient.

En 1870, on faisait Paris-Lyon en 9 heures seulement.

 Les gares de l’Arbresle

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Lorsque le rail arriva à l’Arbresle, près de 17.000 kms de lignes étaient déjà en place en France (il y en aura près de 52.000 à la veille de la guerre de 1914). Le matériel était arrivé à maturité, les rails en acier remplaçaient les rails en fer, et la signalisation faisait des progrès.

L’Arbresle ne fut concernée qu’à partir de 1858, année du début des travaux de construction de la « ligne du Bourbonnais » par la compagnie du P.L.M. Il s’agissait de la ligne Lyon-Roanne qui a été ouverte en 1868.

Les travaux nécessités par la création du chemin de fer du Bourbonnais durèrent environ dix ans. Ils firent affluer à l’Arbresle et dans ses environ des milliers de travailleurs. Pendant tout ce temps, l’animation fut grande dans notre région. La population arbresloise s’accrut et de même ses profits.

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Le plus important travail exécuté fut la percée d’un long tunnel, partant de la gare actuelle de l’Arbresle en direction de Tarare et débouchant au hameau de Persanges. Il en fut ainsi de la percée de cinq petits tunnels reliant les neuf kilomètres qui séparent l’Arbresle de Lozanne.

Mais n’oublions pas que l’Arbresle est une ville carrefour aussi pour le chemin de fer et qu’une deuxième ligne : Lyon-St-Paul-Sain bel, croise la précédente.

À peine la voie ferrée du Bourbonnais était-elle ouverte au public qu’une autre ligne fut mise en construction. 

En voici l’histoire : c’est une loi sur les chemins de fer locaux de juillet 1865 qui autorisa les départements à construire ou faire construire des  lignes d’intérêt local. Suite à cette loi, le Préfet du Rhône propose la création de sept lignes : le Conseil général en retient quatre dont : Lyon – Lentilly – Les Ponts-Tarrets (30 kms) et Lentilly – Ste-Foy l’Argentière (24 kms).

Les frères Mangini, industriels ayant une bonne expérience dans le domaine ferroviaire puisque, entre 1865 et 1866, ils construisirent plusieurs lignes dans les départements voisins, se portent candidats pour réaliser la ligne Lyon – Lentilly – Ste-Foy-l’Argentière, mais à condition de la prolonger jusqu’à Montbrison…et pourquoi pas un jour jusqu’à Bordeaux, un de leurs rêves…

""  La gare des Dombes, côté Eveux, aujourd’hui disparue

Cette ligne est déclarée d’utilité publique en 1868, puis transformée en ligne d’intérêt général. Elle est attribuée aux frères Mangini le 8 mai 1869.

Sur un coût estimé à 28 millions, l’État s’engage à verser une subvention de 12 millions. De son coté, le Département doit verser à l’État 2 millions pour que la ligne parte de St Paul et non de Vaise.

Les travaux souffrirent de la désorganisation due à la guerre de 1870, à laquelle s’ajoutèrent, dans le quartier St Paul à Lyon, la difficulté des travaux en tranchées et tunnels, la nécessité de murs de soutènement (un éboulement eu lieu en 1876).

 En 1870, la municipalité proteste contre les nuisances liées au transport routier des pyrites des mines de Sain Bel par les locomobiles Perret (propriétaires de la mine).    

Pendant la construction de la ligne Mangini, les minerais de pyrites de St-Pierre et de Sourcieux étaient amenés à Sain Bel par un petit chemin de fer Décauville ; de là, une locomotive poussive et sans rails, remorquait trois ou quatre wagons lourdement chargés de pyrite jusqu’à la gare P. L. M. à l`Arbresle. Cette locomotive faisait deux fois par jour le voyage aller et retour, à l’allure du chariot mérovingien. Elle défonçait parfois notre belle route de Bordeaux et laissait toujours sur son passage une épaisse fumée.

Lorsque la ligne Mangini fut mise en marche, en 1873 sur un premier  tronçon l’Arbresle-Sain Bel,  elle put amener rapidement sur ses rails le précieux minerai jusqu’à l’Arbresle. L’ancien régime de transport prit fin, à la satisfaction de tous. À partir de l’Arbresle, les wagons étaient dirigés vers leurs destinations.

Les autres tronçons, l’Arbresle-Lyon et Sain Bel-Monbrison sont mis en service en 1876. Le voyage se faisait entre Lyon et Montbrison en 3 heures environ. Aux abords des stations, une double voie existait pour permettre les croisements.

À l’époque 3000 ouvriers environ ont été journellement employés pour ces travaux importants pendant le temps qu’ils devaient durer ;  les ouvriers travaillaient durement pour édifier les ouvrages importants que l’on rencontre encore de nos jours dans la vallée de la Brévenne.

Une seconde gare a été construite. C’était la « gare des Dombes » aujourd’hui disparue. Elle fut démolie le mercredi 7 février 1996. Les bâtiments où les dernières années des employés de la S.N.C.F. étaient logés étaient devenus très vétustes. Elle a laissé la place a des parkings afin d’inciter les Arbreslois allant travailler à Lyon, à prendre le train.

Pourquoi la « gare des Dombes » ? Tout simplement parce que la société des frères Mangini se nommait compagnie des Dombes (région où ils construisirent leur première ligne).

À la suite de difficultés financières, les frères Mangini cèdent leur réseau en 1884 à la société PLM  qui était déjà leur principale concurrente et avait une taille plus importante.

C’est ainsi que pendant plus d’un siècle, notre petite ville eut deux gares pour elle toute seule : la gare du Bourbonnais et la gare des Dombes.

Il fut aussi question de construire une ligne de chemin de fer à voie étroite de L’Arbresle à Panissières qui devait ouvrir des débouchés au commerce des pays des Monts du Lyonnais,  assez mal desservis.

Cette ligne, dont les premiers tracés furent soumis à l’enquête en 1907, devait être terminée deux ou trois ans plus tard ; mais les travaux entrepris sont restés inachevés, le projet de construction de la ligne ayant été abandonné par suite de l’importance que devait bientôt prendre le trafic routier automobile.

""  Un siècle sépare les deux photos. Sur la première, au début du XX° siècle : le train avec sa locomotive à vapeur traverse le passage à niveaux devant lequel attend une charrette, et derrière la charrette, la maison du gardien.

"" Dessous en 2000, le passage souterrain a remplacé le passage à niveau et turbotrains et autorails ont supplantés la vapeur.

Il faut signaler qu’il a fallu plus de 120 ans pour que le passage à niveaux disparaisse. En effet dès 1877, des protestations s’élevaient pour sa suppression et au fil des années elles se renouvelèrent. Il y eut des projets de pont par-dessus les voies ou par-dessous.

C’est finalement  le 24 mai 1996 que le passage fermait définitivement. Le même jour, la route de déviation allant du quartier des Vernays à Eveux étant mise en circulation, permettant de  dévier la circulation, en attendant la mise en service du passage souterrain.

La maisonnette des gardes-barrières tombait à son tour le 3 juin 1996. Une page était tournée.

 Les équipements

Les locomotives à vapeur  étaient les reines du rail et le restèrent jusqu’en dans les années 1970 (l’abandon définitif de la vapeur date de 1974).

Elles avaient leurs exigences avec par exemple un besoin important en eau. Les gares étaient donc équipées de châteaux d’eau, capables d’assurer un gros débit dans un temps très court. Des grues hydrauliques assuraient le remplissage des tenders d’eau dont la capacité était en général de 30 m3.

""  Grue hydraulique pour fairele plein des tenders     

 La guerre n’épargna pas les équipements et le matériel de la gare. Le 18 août 1944 au soir, les maquisards s’emparèrent de la gare, sabotèrent le téléphone, détruisirent le château d’eau et les aiguillages, firent dérailler 4 locomotives dont l’une alla obstruer le tunnel du Cornu, une cinquième fut abandonnée vers les carrières après Courzieu.

Le réservoir d’eau a été reconstruit en 1945. Bien que devenu inutile il se dresse toujours fièrement au bout de la gare, près du pont sur la Brévenne.          

À partir de 1930, le diesel remplaça progressivement la vapeur. Mais ce mode d’énergie a été freiné à son tour avec l’impact de la crise pétrolière en 1975. Son efficacité a sensiblement été améliorée avec les Turbotrains : à partir 1973 les Arbreslois purent voir passer le RTG (Rame à Turbine à Gaz) desservant Nantes. En l’an 2000, l’électricité assure plus de 90 % de l’énergie de la traction en France.

""  L’ancien château d’eau détruit à la libération. On remarquera en arrière-plan le couvent des Ursulines aujourd’hui disparu et remplacé par la maison de retraite des Collonges

Le diesel reste la règle pour les manœuvres, les liaisons courtes (autorails) et sur les lignes non électrifiées, ce qui est le cas des lignes traversant l’Arbresle.

Bien d’autres équipements sont tombés en désuétude.

""  Le poste d’aiguillage type SAXBY.   Modèle mis en place en 1880.

Ainsi notre bon vieux poste d’aiguillage, supplanté par l’électricité et l’électronique. Il est malheureusement devenu la proie des vandales à en voir l’état des vitres. Il fait pourtant partie de notre patrimoine et il mériterait sûrement un meilleur sort. Peut on espérer que, soit la S.N.C.F. soient d’anciens cheminots, soucieux de conserver ce qui fut leur cadre de travail pendant toute une carrière, prendront l’initiative de le remettre en état avant sa disparition définitive ? Si tel était le cas, qu’ils sachent que les « Amis du Vieil Arbresle » seront à leurs cotés pour une telle réhabilitation.

L’activité marchandises subit un coup d’arrêt lors de la fermeture des mines de Saint Pierre-la-Palud et le trafic ferroviaire dans ce domaine ne concerne plus guère que les granulats des carrières de la Patte de Saint Laurent-de-Chamousset.

""  Il y avait parfois des pannes, mais les voyageurs les prenaient avec philosophie

La gare des Dombes devenue inutile voyait ses jours comptés, ainsi qu’une partie des voies de triage. Les deux passage à niveaux étaient eux aussi appelés à disparaître tant ils gênaient la circulation.

Ce fut chose faite en 1996. Tout le secteur sud de la gare laissa la place à des parkings et un passage souterrain remplaça les passages à niveaux.

 Les Transports Express Régionaux

Au cours des années 60 à 80, la SNCF tente de supprimer des lignes régionales jugées non rentables. L’effet en fut limité devant l’hostilité générale provoquée par ce projet. L’une des conséquences a été la mise en place à  partir des années quatre-vingt, de schémas régionaux de transports collectifs.

Les Conseils Régionaux devinrent participants et surtout pourvoyeurs de fonds. La Région Rhône-Alpes fut l’une des plus dynamiques dans ce domaine. L’objectif était de revitaliser les transports régionaux par d’importants programmes de modernisations  d’infrastructures, de matériels et par des aménagements d’horaires adaptés aux besoins

L’ancien…     …et le nouveau

Pour l’Arbresle et pour la ligne Sain Bel-Saint Paul le résultat a été spectaculaire : aménagement de parkings près de toutes les gares du parcours ; à l’Arbresle l’effet a été particulièrement sensible après l’aménagement de parkings sur l’emplacement de la gare des Dombes et la construction du pont remplaçant les anciens passages à niveaux.

Le deuxième effort décisif a été l’augmentation de nombre de rames en circulation avec des horaires bien adaptés aux personnes travaillant à Lyon. Ainsi, un premier autorail part dès 6 heures le matin, et de 6 h 30 à 8 heures, les départs sont cadencés tous les quarts d’heure. Pour le retour, il en est de même avec une rame tous les quarts d’heure de 19 h à 21 h 15 Il ne s’agit là que de la ligne Saint-Paul. Il faut y ajouter les trains desservant les gares de la Part Dieu et Perrache.

Le résultat a été jusqu’à présent été positif avec une augmentation sensible du trafic voyageur. Cependant l’adéquation entre places de parkings et candidats voyageurs  reste très mal maîtrisé, surtout aux approches de Lyon.

Bernard Isnard

Il faut compléter cet article écrit en 2001 : aujourd’hui, c’est le "tram-train" qui a pris le relais avec une cadence accrue et une rapidité qui met Lyon à une demi-heure à peine de notre cité. Un nouveau parking est également en cours d’aménagement. Nous sommes loin de la malle poste !

Bibliog. :
Maurice Berthault –Journées d’études 1996 des Sté Historiques du Rhône.
Patrimoine de la SNCF et des chemins de fer français.
Photos : pré inventaire et  Archives perso. : Gilbert Sylvestre.
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