LES CRUES
Résumé
Le niveau des rivières, ici à l’étiage, ne permet guère d’imaginer la furie de leurs eaux en certaines périodes.
La situation de notre ville, privilégiée au confluent de deux vallées a aussi ses inconvénients. Les inondations à répétition en font tristement partie. On est parfois tenté de penser à chaque nouveau débordement de nos rivières que "on a jamais vu ça". L’histoire nous démontre le contraire ; voici quelques traces écrites d’anciennes catastrophes dont les conséquences étaient autrefois, autrement fâcheuses avec leurs lots de famines et d’épidémies. Les quelques photos qui illustrent ce sujet démontrent aussi, il faut avoir le courage de le reconnaître, l’incapacité des services " compétents " à mettre en place des infrastructures adaptées à une réalité qui dure depuis des siècles.
1196 – " De grandes pluies submergèrent les contrées riveraines de la Saône, de l’Azergues et de la Brévenne, à tel point que les hostilités cessèrent entre Philippe Auguste et Richard Cœur de Lyon. "
1268 – " Une terrible inondation qui causa de grands ravages, emportant tout sur son parcours. "
1408 – " Une inondation terrible jeta la terreur dans le pays Arbreslois. La Brévenne et la Turdine débordèrent et inondèrent notre petite ville dans ses parties basses.»
Des ponts construits trop bas…"
1500 – " Un acte capitulaire indique que "l’Abbé Jean d’Albon (supérieur de Savigny), ne pouvant se rendre au synode de mai, à cause de l’inondation des eaux de la Brévenne, donne procuration pour le représenter, à deux chanoines de sa famille."
1692 – " Une inondation succède à un gel important, ce qui entraînera en 1693 une famine sans précédent."
1715 – " II y a quelques jours tomba une pluie si abondante, et cela pendant trois heures seulement que la force des eaux emporta le pont de Dorieux, et plus près de nous une grande partie des maisons de l’Arbresle. Que dirais-je de plus ? Représentez-vous le déluge universel. Les eaux en effet envahissent si rapidement les maisons que ceux qui y dormaient (car ce déluge arriva pendant la nuit), subitement réveillés, non pas dans leur lit mais dans l’eau. Les maisons étaient entourées par l’inondation. Essayer d’en sortir était impossible. Ces malheureux gagnèrent donc les toits comme ils purent. De toutes les parties de la ville on entendait de grands cris qui appelaient au secours. Chacun sentait que son dernier jour était arrivé, ce qui fut, hélas ! La réalité pour un grand nombre. Il y eut 200 victimes, si bien qu’on appela désormais le quartier St Julien le quartier des martyrs. » (Notes du curé Desplaces, curé de l’Arbresle à l’époque).
Cet orage titanesque (resté dans les mémoires sous le nom de "déluge de Tarare") dans la haute vallée de la Turdine, déversa sur Tarare des trombes d’eau. En peu de temps, la rivière se transforma en un véritable fleuve, entraînant sur son passage tout ce qu’il rencontrait. A l’Arbresle existait à l’époque un pont assez bas, à la place de l’actuelle passerelle Sapéon.
La coulée de boue, de roches, de branches et de troncs vint s’écraser contre le pont et y bâtit un barrage naturel, puis l’emporta dans sa course effrénée. Tant que le barrage tint, ces eaux torrentielles montèrent et immergèrent le quartier Saint Julien. Les maisons furent sapées dans leurs fondations et s’effondrèrent, noyant dans leur chute les occupants qui avaient pu se réfugier sur les toits.
Deux maisons seulement avaient résisté à la crue : l’hôtel des Trois Maures et la demeure du maréchal ferrant Collet. Il y a controverse quant au nombre de victimes, mais les eaux des deux rivières se rejoignirent dans le village, ce qui donne une idée assez précise de l’ampleur des dégâts. C’est cette catastrophe qui sera à l’origine de la construction d’un pont plus en amont et plus élevé (le pont actuel) et la construction d’une nouvelle rue, à l’extérieur du mur d’enceinte, la rue Centrale (actuellement rue Charles de Gaulle."
1758 – Le dimanche 27 et lundi 28 août, jour et nuit, ouragans, chutes d’eau et foudre ont fait des dégâts inexprimables, les fonts ont été enlevés, les chanvres emportés par les eaux,
1765 – "Le 20 juin, nos deux rivières sortent une nouvelle fois de leur lit et font plusieurs victimes. Cette inondation est à nouveau attribuée " aux grandes eaux descendues de la montagne des Sauvages. "
1827 – " Pluies diluviennes ayant transformé en torrents dévastateurs les cours d’eau de la région. Le pont de Sain-Bel est emporté."
1840 – " Des pluies persistantes font déborder ruisseaux et rivières. Les inondations durèrent près d’un mois. "
A une époque plus récente, d’autres graves inondations pour lesquelles nous avons assez de souvenirs pour prévenir l’avenir.
1882 – Le 10 juillet, suite à des pluies torrentielles, des éboulements se sont produits en différents points sur la ligne (de chemin de fer) de Lyon à Montbrison. D’autres éboulements se sont produits avant l’Arbresle et entre l’Arbresle et Sain-Bel.
1900 – Dans la nuit du 23 au 24 août une formidable crue des deux rivières a provoqué des inondations dans les maisons et les usines. Dans l’usine Fichet, un mur ayant cédé les métiers à tisser se sont retrouvés sous 80 cm d’eau. Et, à nouveau des éboulements sur la ligne de chemin de fer.
1907 – L’inondation a eu lieu le 19 octobre. Des déclarations de dégâts ont été déposées pour des mobiliers, provisions, outils, récoltes, linge et… un bateau-lavoir ! Les indemnités versées se sont montées à 184.75 F pour des dégâts évalués à 2450 F !
1983 – L’une des crues importantes des rivières, le 17 mai avec des débits de 124 m3 /seconde pour la Brévenne et 102 m3/seconde pour la Turdine. A la Brévenne et 102 m3/seconde pour la Turdine. A titre de comparaison, les crues centennales sont estimées respectivement à 154 m3/seconde et 136 m3/seconde pour ces deux rivières. C’est à la suite de ces crues de 1983 que d’importants travaux ont été entrepris, dans le lit de la Brévenne, qui se sont par la suite révélés très efficaces.
1989 – 1996 – Crues relativement moins importantes que la précédente.
2000 – Le samedi de Pentecôte, 10 mai, un orage d’une exceptionnelle violence à réuni tous les éléments capables de causer des dégâts considérables :
– L’abondance de l’eau tombée qui a été estimée à 200 mm en moyenne, soit pratiquement le quart des précipitations annuelles, condition qui à elle seule suffisait pour provoquer les débordements des cours d’eau,
– durée assez courte : l’orage a commencé vers 20 heures, mais n’a guère duré plus d’une heure ce qui a provoqué des ruissellements très importants et très violents et pas seulement au fond des vallées,
– la grêle, inégale dans sa répartition, avec des grêlons d’une taille en général limitée à part quelques exceptions, mais elle aussi en telle quantité qu’elle a souvent été à l’origine de l’obstruction des grilles d’évacuation.
Les dégâts par débordements ont été constatés aux abords de la Turdine qui a envahi la place Sapéon et le quartier Saint Julien, en ville ; en amont, c’est le stade et la salle Claude Terrasse qui ont été inondés.
A noter que ces débordements ont été moins importants qu’en 1983 pour la Brévenne et plus importants pour la Turdine. En ville, les conséquences tristement habituelles en de telles circonstances : caves et rez-de-chaussée envahis par la boue, voitures emportées par le courant, monceaux de débris végétaux accumulés dans le lit et aux abords de la Turdine.
Quand on observe le lit de la Turdine, on ne peut que constater que bien des éléments sont réunis pour favoriser un débordement :
– cours sinueux à l’entrée de la ville, – berges fragiles donc potentiellement capables d’alimenter le courant en débris divers; – multiplication des obstacles en ville : ponts, piles de soutien de la déviation… – aucune mini-digue sur les rives pour contenir une crue limitée.De quoi alimenter une réflexion et des études sérieuses ; Celles-ci furent confiées à la C.N.R.
(Compagnie Nationale du Rhône). Contrairement à 1983, la Brévenne n’est pas sortie de son lit ; ceci est certainement dû aux importants. travaux de curage et d’enrochement des rives, effectués après l’inondation de 1983.
Les dégâts par ruissellement ont été considérables et parfois en des lieux où l’on ne les attendait pas. Le gymnase du Groslier par exemple, pourtant situé en hauteur a été touché. Maisons, garages inondés par ruissellement innombrables. Ainsi que les glissements de terrain, éboulements, ravinements et destructions de chemins, provoquant des interruptions de circulations temporaires, voire définitives pour certains chemins qui devront être complètement refaits. L’une des inondations les plus importantes qu’ait connu l’Arbresle a laissé une trace gravée par l’homme : Rue Pierre Brossolette, à une dizaine de mètres à gauche en partant de la place Sapéon, derrière une descente d’eau pluviale, à environ 1.4 m. du sol. Malheureusement, l’inscription qui mentionne la Turdine et donne la date est illisible en ce qui concerne l’année.
2003 – Début décembre : une pluie constante lundi 1er et mardi 2. Moins de 48 heures de pluie qui, semble t-il, n’était pas particulièrement diluvienne, et voilà les vallées paralysées. La crue a atteint son maximum à l’Arbresle dans l’après-midi de mardi 2 décembre et le mercredi matin, le niveau était redescendu d’un bon mètre, laissant sur toutes les parties basses de la ville une épaisse couche de boue.
2008 – Pluies diluviennes le 1er novembre – Débordement violent et rapide des rivières dans le courant de la nuit. Une hauteur d’eau qui atteint 1m50 près de la porte du musée – Dégâts considérables dus à la soudaineté de la catastrophe : appartements envahis par la boue, voitures noyées, caves inondées, éboulements…
La violence de la montée des eaux a été facilitée par une précédente crue le 22 octobre qui avait saturé les terrains des bassins versants. La Turdine n’a pas atteint une hauteur très importante, alors que la Brévenne a très largement dépassé les hauteurs connues lors des précédentes crues. Les hauteurs d’eau dans les parties basses de la ville sont dues en grande partie au refoulement des eaux ne pouvant s’évacuer sous le giratoire Est de la ville.
Notes extraites de différents ouvrages historiques ou anciens, sur la région.